Une introduction au droit et au système judiciaire

Grey Casgrain s.e.n.c.
6 min readAug 10, 2021

Co-rédigé par Carolyn Booth, stagiaire en droit et Maître Cassandra Modafferi

Le monde juridique qui nous entoure peut sembler très compliqué, et il l’est. Il est surprenant que la loi, un outil conçu pour protéger les droits des individus, soit si difficile à comprendre. Croyez-nous, les avocats ne sont pas nés avec la capacité de comprendre la loi dès la première lecture — il faut des années d’études, de formation et toute une vie de pratique pour devenir des experts en droit. Soulignons également que l’accès aux facultés de droit est toujours limité à ceux qui ont les moyens financiers de s’inscrire et à ceux qui peuvent obtenir les dossiers scolaires suffisamment compétitifs pour être acceptés. Le privilège joue un rôle, même lorsqu’il s’agit de pénétrer dans le monde du droit, et comme Oncle Ben dans le film Spider-Man de Marvel l’a (presque) dit, « Avec un grand [privilège] viennent de grandes responsabilités ». Avec cela, nous allons décortiquer quelques concepts clés sur le droit et le système judiciaire que toute personne ordinaire devrait savoir. Vous trouverez entre parenthèses une traduction utile des termes empruntés au jargon juridique dans le langage du profane.

1. Les juridictions : Lois fédérales et lois provinciales

Tout d’abord, il y a les lois fédérales. Ces lois sont établies par le Parlement canadien et régissent les questions de compétence fédérale (par exemple, les crimes, l’armée, le service postal, la quarantaine, les services bancaires, la monnaie, le divorce, certains aspects du mariage, etc.)

Ensuite, il y a les lois provinciales. Celles-ci régissent les domaines dans lesquels la province a compétence pour légiférer (par exemple, les biens et les droits civils, l’établissement des hôpitaux (non marins), les permis (par exemple, de conduire, d’alcool), certains aspects du mariage, etc.)

Ces compétences sont déterminées en vertu des articles 91 (fédéral) et 92 (provincial) de la Loi constitutionnelle de 1867. Cette distinction signifie que si une législature provinciale adopte une loi dans un domaine qui appartient au Parlement fédéral en vertu de l’article 91 de la Loi constitutionnelle de 1867 (ou vice versa), une personne intéressée pourra demander aux tribunaux d’invalider la loi (l’éliminer) et de la déclarer inopérante. Par exemple, si une législature provinciale adopte une loi (ou même un article de loi) obligeant la province à utiliser une nouvelle devise provinciale (compétence fédérale), un tribunal aurait compétence pour déclarer cette loi inconstitutionnelle.

Il est important à noter qu’avant l’adoption des lois fédérales et provinciales, les communautés autochtones avaient leurs propres traditions juridiques. Au fur et à mesure que les différents niveaux de gouvernement travaillent à la réconciliation avec les groupes autochtones, les traités et les coutumes autochtones sont tranquillement reconnus par les tribunaux fédéraux et provinciaux, conférant aux communautés autochtones des droits acquis sur leurs anciennes traditions (par exemple, l’exploitation forestière, la pêche, etc.). Ces jugements rendus par les tribunaux établissent une jurisprudence validant et protégeant les droits autochtones, qui peut ensuite être utilisée comme un précédent pour défendre et protéger d’autres droits.

2. Traditions : La common law et droit civil

La common law et le droit civil sont des traditions différentes sur lesquelles reposent des systèmes juridiques entiers.

La common law découle des précédents établis par les décisions des tribunaux, également appelée jurisprudence. La jurisprudence est un amalgame de tous les jugements rendus par les juges dans les tribunaux pour déterminer comment une affaire doit être tranchée. L’ensemble de ces décisions constitue les règles juridiques d’une juridiction de common law. Par exemple, dans une affaire de 1935 intitulée Woolmington v. DPP, la Chambre des Lords anglaise a dû décider si Reginald Woolmington était coupable du meurtre de sa femme. Dans cette affaire, la Chambre des Lords a décidé que Woolmington serait condamné pour meurtre uniquement si le procureur de l’État était en mesure de prouver sa culpabilité hors de tout doute raisonnable. Cela signifie que l’innocence de l’accusé est présumée et que toute personne accusée d’un crime est innocente jusqu’à ce que sa culpabilité soit prouvée. C’est d’ailleurs ce fardeau de la preuve qui demeure applicable dans le système actuel de droit criminel canadien. La différence entre le droit criminel et le droit pénal sera expliquée ci-dessous à la section 4.

Souvent, les précédents sont inscrits dans des lois qui sont rédigées par un corps législatif (les élus qui rédigent les lois). En fait, l’exemple ci-dessus se trouve maintenant à l’article 11d) de la Charte canadienne des droits et libertés, qui préserve le droit « d’être présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie, à l’issue d’un procès public et équitable devant un tribunal indépendant et impartial ».

Les juridictions de la common law comprennent l’Australie, l’Angleterre, les États-Unis d’Amérique (à l’exception de l’état de Louisiane), l’Inde, entre autres.

Le droit civil est codifié (par exemple, numéroté, alphabétisé, etc.) par un organe législatif. Au Québec, le droit civil s’inspire largement du Code civil français. En fait, de nombreuses règles de droit privé au Québec (p. ex. le droit des contrats, la responsabilité civile, le droit des biens) reflètent celles qui existent en France. Les juridictions de droit civil comprennent, entre autres, l’Espagne, la France, l’état de la Louisiane, l’Allemagne, l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud.

Au Canada, le droit privé québécois est issu de la tradition du droit civil, alors que la common law est la source du droit privé dans les autres provinces canadiennes.

3. Les lois réglementaires (ou règlements)

On oppose souvent une loi réglementaire à une loi, car alors qu’une loi est élaborée par un corps législatif (c’est-à-dire par des élus qui créent les lois), une loi réglementaire est instituée par un organe administratif. Un organe administratif a uniquement le pouvoir d’élaborer des lois réglementaires dans la mesure où une loi lui accorde ce pouvoir.

Un organe administratif est une agence ou une autorité qui existe afin de gérer et de réglementer un domaine spécifique du droit. Il peut créer des règles régissant son domaine de compétence.

Par exemple, au Québec, la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) est un organisme administratif qui adopte des règlements relativement aux exigences pour l’obtention d’un permis de conduire, l’immatriculation d’un véhicule, etc. Cet organisme se voit conférer des pouvoirs par diverses lois relatives à la conduite et à la propriété des automobiles.

4. Droit criminel et droit pénal

Le droit pénal canadien trouve sa source dans le Code criminel du Canada (juridiction fédérale, régime de common law). Le Code criminel décrit les crimes et les peines qui y sont associées, qui peuvent comprendre des amendes, des peines d’emprisonnement ou la libération conditionnelle, par exemple. Les crimes de nature grave se retrouvent dans le Code criminel (p. ex. meurtre, agression sexuelle, vol).

Contrairement aux crimes de nature grave, les infractions pénales sont nécessairement objectivement moins graves. Les infractions pénales sont régies par les provinces ou leurs municipalités. Des exemples d’infractions pénales sont le fait de ne pas tenir son animal en laisse, de traverser en dehors des passages piétonniers ou de faire du bruit excessif. Il s’agit de légers ennuis qui entraînent une sanction légère, comme une amende, sans casier judiciaire ni possibilité d’emprisonnement, de manière générale.

Certaines infractions, comme celles liées à la conduite automobile, peuvent être soit criminelles, soit pénales, selon leur niveau de gravité (vitesse, dangerosité, préjudice causé à autrui, etc.).

Nous espérons que nous avons pu vous aider à décortiquer ces concepts de manière à les rendre plus compréhensibles. Il existe de nombreuses ressources pour aider le public à apprendre et à comprendre le droit. Les sources officielles du gouvernement sont un excellent point de départ. Pour le droit canadien, visitez le « Site Web de la Législation » à https://laws-lois.justice.gc.ca/fra. Les provinces offrent également des ressources similaires; par exemple, au Québec, visitez le site Éducaloi https://educaloi.qc.ca/fr/.

Veuillez noter que les ressources en ligne ne donnent pas de conseils juridiques et que les interprétations de la loi peuvent varier selon la jurisprudence. Si vous avez besoin de conseils juridiques, contactez-nous et nous serons heureux de vous aider.

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